Je te hais de tes cheveux jusqu'à ta ceinture !
Pour ce qu'il y a en dessous, c'est discutable...
Le conflit le plus difficile à résoudre et celui qui se trame en notre for intérieur, quand la raison est dépassé par notre instinct. Je ne peux ni accuser la lune ardente en cette saison, ni la chaleur brûlante du désert qui s'étendait non loin de là, dans la région, mais uniquement mes propres ardeurs et aujourd'hui je m'en mord encore les doigts. Et les siens, quand je le peux.
Flashback – Lune du Tatou Ardent, il y a cinq ans.
Être chevalier signifiait défendre les intérêts du peuple et protéger les souverains de ce pays, mais parfois certaines tâches qui nous incombait n'étaient pas très passionnantes et traînait nos sandales dans la boue du bas peuple. La boue, c'est ainsi que je qualifiais la ville de Khor, car bien que ses habitants devaient se plier à la gouvernance de sa Majesté Impériale, ils n'en faisait qu'à leur tête et il était très délicats de négocier avec eux. Ils vivaient avec leurs propres lois, anarchistes dans l'âme, rebelles et sans scrupule. Des pirates, tous bons à être pendus, mais peut-on pendre toute une ville sans réveiller la colère de leurs voisins ? C'est pour cela que ces vers, et croyez le ou non j'aimais le peuple de Nael plus que je n'aimais mon père, mais je ne peux que qualifier de la pire des manières ces brigands sans foi et sans peur qui installaient une atmosphère chaotique dans l'Ouest de la région. J'avais effectué mon service militaire dans le fort du désert, ainsi mes camarades et moi avions entendu parler des troubles causés par ces voleurs lors de notre formation. Puisque j'étais retournée par la suite à Elsia peu avant ma majorité, mon devoir s'était tourné principalement vers Zabcia et je pensais ne plus me frotter à ses Hommes de milles vices occupant Khor. Malheureusement, je me retrouvais aujourd'hui à suivre mon supérieur avec deux autres chevaliers dans cette ville anarchiste que je ne pouvais supporter.
Il y a deux semaines, mon supérieur avait reçu une missive cacheter d'un sceau d'une personne importante de la cour d'Elsia. Une comtesse de de la région de Tahie, amie de l'expéditeur de cette lettre, s'était faite dérobée l'une de ses tiares les plus précieuses. La couronne d'or blanc était orné d'une centaine de petits diamants scintillants, un d'un grand saphir en son centre : de quoi en faire tourner la tête de plus d'un. J'avais pensé que Tahie était une régions de gueux, ou les villages vivaient de leur récoltes et de leur revente d'animaux. On m'expliqua par la suite que la Comtesse avait justement choisi cet endroit pour établir sa résidence secondaire, ou elle résidait en ce moment pour profiter de vacances avec son époux. La dame de cour était bien embêtée, car elle souhaitait offrir cette tiare à sa fille qui se mariait dans quelques mois. Afin de s’acquitter de cette noble tâche, mon supérieur nous rassembla, ses plus fidèles chevaliers et meilleurs éléments, pour nous mettre dans la confidence de cette mission. Il ne pouvait employer plus d'Hommes, de peur que ceux-ci, avares, ne s'emparent de cette couronne pour la revendre au plus offrant. Bien que nous jurons serment en devenant chevalier, la nature des Hommes peut nous rattraper dans un instant d'égarement. Ainsi, nous sommes partis d'Elsia en petit groupe pour rechercher le cadeau de la mariée. Nous avons pu récolter plusieurs informations qui nous ramenaient à une piste : la couronne d'or blanc avait été vendu à un marchand qui, voulant faire passer le bien à Uxy par voie maritime, avait été intercepté par « Le Grand Navire ». Nous avons eu beaucoup de peine à comprendre le message, car personne n'osait donner le nom exacte du bateau, comme de peur qu'une malédiction s’abatte sur celui qui le murmurerai. Nous n'avons su que plus tard qu'il s'agissait du Léviathan, et que tout trésors qui atterrissaient dans les poches de son Capitaine n'en ressortaient plus. Et bien, s'il fallait lui faire une fouille au corps pour retrouver ce bien, j'allais m'en charger personnellement.
C'est ainsi que notre petit groupe s'est retrouvé au milieu de ces hors-la-loi, dans la ville ou tout les regards se tournaient sur notre passage et ou les messes-basses fusaient derrière nous. Je n'aimais guère cette atmosphère, sans doute n'appréciaient-ils pas notre compagnie parce que nous étions inconnus, ou bien plutôt parce que notre façon de nous comporter dans ce bourbier nous désignaient clairement comme chevaliers - et ils avaient probablement eu quelques différents avec les chevaliers du fort de Cheldis- . Difficile de se mélanger à ce bas peuple de brigands quand un noble sang coulait dans mes veines.
La première taverne nous ferma ses portes immédiatement. La seconde abritait une vieille femme si laide et malodorante que sa seule présence nous invita à déguerpir. La troisième m'apprit à ne jamais commander de boisson dans cette ville, car un énorme mollard flottait dans ma choppe. Enfin, nous arrivions dans une taverne, si l'on peut appeler ça taverne, qui nous paraissait un peu plus abordable que les autres. Un gang d'ivrognes étaient sur le point de déclencher une bagarre entre eux dans un coin de la pièce, tandis que de l'autre côté, quelques hommes riaient outrageusement fort et jouaient aux jeux de fléchettes en utilisant le portrait de je ne sais qui comme cible, et des couteaux à la place des fléchettes allant s'enfoncer dans le mur ou le dessin. Mon supérieur prit place, ses deux autres hommes et moi-même l'accompagnant. Il s'adressa à la tavernière, une femme imposante à la voix rauque, en lui demandant des informations sur le Léviathan et ceux qui naviguent dessus. Elle fit mine de ne rien savoir. Comme tout les habitants de cette ville, elle protégeait quelqu'un. Ou avait-elle peur de lui ? Le voleur de la tiare manipulait-il toute cette population en menaçant, avec sa bande de pirates, de tuer femmes et enfants si on ne le lui vouait pas allégeance ? Que d'idioties, il y avait fort à parier que ceux-ci étaient tout aussi malhonnête que cet homme qui dérobait le précieux cadeau de mariage d'une pauvre enfant sur le point de s'unir.
Mon supérieur lui proposa un prix contre toutes informations. Il y avait peu de chance que cela fonctionne, même en marchandant avec un enfant dans la rue voisine nous n'avions rien obtenu. Non, toute cette ville protégeait l'individu, homme, femme, bête ou je ne sais quoi qui détenait probablement la tiare. Le Capitaine du Léviathan. Il était bien beau d'avoir cette information, mais nous ne pouvions rien en faire en petit effectif dans cette ville hostile. Que pouvais-je faire pour délier la langue de ces gueux qui ne se pliait à aucune règle ? D'ailleurs, courtoisie et politesse ne faisaient pas partie de leur vocabulaire vu leur comportement plus que réprimandable. Mon sang commençait à bouillir, entre leurs rots sonores, leurs rires, leur chuchotements et moqueries envers mon commandant. Calme-toi, Rémilia. Tu es une haute dame, un chevalier digne de porter le même nom que l'Empereur lui-même. Fais abstraction de tes mauvaises ondes, imagine que tu es en compagnie de l'Impératrice qui t'offre le thé dans son jardin aux milles odeurs. Oui, pas au milieu de ces cancres qui sentent la sueur et le rhum.
Après avoir parlé avec le baryton qui se trouvait en face de nous, mon supérieur ouvrit son sac pour lui offrir la somme demandé. Allions nous enfin avancer dans notre enquête ? Je le croyais, mais le sourire de cette femme au vu du sac d'or qu'on lui tendait me ramena prestement à la réalité. Nous étions entouré de voleurs. Nous ne pouvions faire confiance à personne ici, et en plus nous venions de leur prouver que nous détenions assez d'argent. Je repris immédiatement mes esprits et, d'un coup vif, détacha le poignard de la ceinture de mon camarade à côté de moi et le dirigea vers la main de la tavernière qui s'apprêtait à empocher le sac d'argent sans nous fournir, et j'en étais sûr, le moindre renseignement. A quoi pensions-nous en nous engageant dans une procédure avec tant de formalités et de bons procédés ? Un rapide coup d'oeil à ma droite me fit comprendre que les ivrognes du coin étaient prêt à nous bondir dessus. Il y avait quelques clients aux tables encapuchonnés alors que le soleil tapait et qu'aucun vent ne soufflait. Et ces joueurs de fléchettes ? Ils riaient de nous, et non de leur jeu. Nous avions fait l'erreur de croire que nous pouvions régler notre problèmes comme nous le faisions habituellement, avec des personnes civilisées. Mais nous n'étions pas avec des personnes qui nous respectaient. Nous étions au milieu d'une bande de bandits que nous ne pouvions traîner en justice, et cela me mettais hors de moi. Il fallait s'intégrer, ou du moins se faire entendre dans ce vacarme. D'un coup vif, je me retournais pour envoyer le poignard en direction du visage, de la « cible » affichée sur le mur du fond. L'arme passa entre deux joueurs et vint se planter dans le nez, en plein milieu de la cible. Peut-être ai-je raté ma vocation d'archère ?
- QUELQU'UN DANS CE TROU PEUT-IL NOUS CONDUIRE AU CAPITAINE DU LEVIATHAN, OU FAUT-IL QUE J'AILLE MOI-MÊME LE CHERCHER PAR LA PEAU DES C ...
Mon calme s'était envolé, ma patience avait atteint ses limites. Mains sur le pommeau de ma rapière, je m'apprêtais à me défendre en cas de besoin. J'avais ouvert les hostilités sous les yeux désapprobateurs de mon supérieur. Il fallait se faire entendre. Je n'avais pas le choix, je devais me plier à leur règles. Mais ici, des règles, il n'y en avait pas.