A quatre pattes, la vieille Petrushka se dirigea jusqu’à la forêt. Elle n’eut pas besoin de s’y aventurer, elle trouva ce pourquoi elle s’était déplacée à l’entrée de cette jungle. Il y avait des sortes de grandes tiges, comme des lianes, et elle testa leur solidité. Bon, il semblait que ces lianes n’étaient pas aussi solides qu’elle l’aurait voulu. Si elle avait eu le temps, et si elle avait eu des bambous devant elle, elle aurait pu les transformer en cordes fines mais incroyablement résistantes car là était l’une des propriétés du bambous. La technique pour faire une corde à partir du bambou était de retirer la partie extérieure du chaume, la laisser sécher, puis la tresser. Tout cela demandait énormément de temps et évidemment, la présence de cette plante qu’elle ne voyait pas ici. C’est pourquoi elle devait se contenter de ce qu’elle trouvait, dont ses tiges en face d’elle. La grand-mère les enroula autour de ses bras squelettiques afin de ne pas avoir à les porter, après tout, elle devait encore ramener quelques matériaux : le bois.
La puante dénicha des morceaux de bois convenables qui pourraient aisément servir d’attèle une fois coupés et taillés à la bonne taille. Elle se mit debout pour les empiler les uns sur les autres, il fallait absolument qu’elle réussisse à les ramener à l’endroit ou les chenapans l’attendaient. Elle en avait sélectionné des ni trop fins, ni trop épais. Contrairement à ceux présents sur la plage, ceux-ci étaient secs. Elle les observa attentivement pour prévenir d’une présence d’insectes ou de termites indésirables qui rendraient les morceaux de bois inutilisables. Une fois la pile de bois faite, elle les transporta avec difficulté : cette fois-ci, elle ne pouvait se mettre à quatre pattes et s’aider de ses mains pour marcher. Elle avança donc prudemment pour éviter une quelconque chute, et pour rejoindre le plus vite possible la petite troupe. Après tout, elle se devait de les surveiller, ces mômes.
Lorsqu’elle revint au point ou elle les avait laissés, la momie posa ses trouvailles tout en s’essuyant le front. Elle s’assit, puis commença sa fabrication. En premier lieu, elle ne remarqua pas la présence de la nouvelle venue, trop occupé à gérer son état lamentable de fatigue, le soleil qui lui brûlait les yeux et la gorge, et son activité. Puis, elle leva la tête pour murmurer quelques mots incompréhensibles dans sa barbe. Elle reprit son tressage de corde, puis à nouveau leva la tête en grognant.
- Quoi, encore une gosse malade ? Qu’est-ce qu’il te faut à toi, crapule ? Tu ne pouvais pas être là en même temps que tout le monde ?
Elle observa l’individu aux longues oreilles. Pendant un instant, elle repensa à Chugon, aux rires qui résonnaient dans ces grottes, aux enfants ulfedhins qui avaient également de longues oreilles poilues. Elle soupira de nostalgie tout en continuant ses gestes précis.