une nouvelle tête dans un monde inconnu
Ami plutôt proche de Tadase, tu avais été chargé d’aller chercher, à la bordure de l’Océan de Kila, un nouvel étranger tout droit débarqué à Uxy. Ce n’était d’habitude pas le genre de requête que l’on te demandait, vu ton manque de diplomatie ou de bonnes paroles, mais tu avais tout de même accepté, sur demande du Prince, chef des Gardiens, organisation que tu avais rejoint il y avait quelques temps maintenant. Tu te contentais d’obéir aux ordres, tant que tu rendais service, tant que tu étais payé et que tu pouvais manger, cela te suffisait. Les températures douces d’Uxy ne te plaisaient pas pour autant, toi, tu étais habitué aux nuits plus fraîches de la forêt, parfois, toute cette vie sauvage te manquait. M’enfin, tu essayais de ne pas rester dans le passé, et d’avancer, tu avais de nouveaux objectifs. Sans personne pour t’accompagner, parce que tu préférais faire la route seul, plutôt qu’avec des gens qui passeraient leur temps à parler ou à râler, ça c’était ton rôle, tu pris la route pour le sud du Continent Uxynaelite.
Si Tadase t’avait demandé d’aller chercher cette personne, c’était parce qu’il avait dit être un Prince, du coup, forcément, toi, tu te disais que c’était un truc de Princes, mais ne pouvait-on pas te considérer comme tel, alors que ton frère était maintenant à la tête du clan des Kitsunes d’Uxy ? Tss. Les titres t’importaient peu, seules les preuves avaient de réelles importances. Ce qui t’énervait sans doute le plus, c’était que tu savais au fond de toi que ton frère méritait un tel titre, un tel rôle. Il en avait la carrure, le sang-froid et la tête bien ancrée sur ses épaules, contrairement à toi, qui t’enflammait à la moindre braise, déchaînant ta fureur comme un feu sur une terre isolée et sèche. Les griffes à tes pieds balançaient des cailloux sur ton passage, alors que tu essayais de t’imaginer à quoi pouvait ressembler un Prince d’un pays que tu ne connaissais pas. Que personne ne connaissait d’ailleurs.
L’heure n’était cependant pas aux questions, parce que tu avais une longue route à faire avant d’arriver à destination. Si le jour, tu étais vêtu de ta fidèle tenue rouge vif, la nuit, tu te permettais de préparer un petit package pour pouvoir renifler et te balader sous ta forme Kitsune. La liberté que tu ressentais dans cette forme était comme l’odeur de la viande, enivrante, captivante. Oui, la vie sauvage était certainement ce qui te correspondait le mieux, mais tu avais un but à atteindre. Tu étais prêt à tout pour y arriver. Plusieurs jours passèrent sans que tu ne t’en rendes vraiment compte, tu étais enfin arrivé à bon port, et pour cette expression, elle valait vraiment d’être dite. Il s’agissait d’un campement militaire, accueillant du mieux qu’il le pouvait, les étrangers, en attendant une escorte jusqu’à la capitale. Toi, tu étais là pour le Prince étranger, le dernier arrivé à Uxy pour l’amener à Nirally, histoire qu’il fasse connaissance avec ton Prince à toi. Ah, ces histoires de Princes.
Tu poussas un vague soupir, alors que tu pénétras dans le campement sous la forme d’un énorme renard noir. Ici, tu ne serais pas chassé, on te connaissait pour être le Kitsune hors du commun, et ton pelage changeant de couleur était connu de tous. Un soldat vint t’emmener jusqu’à une tente, ou te repris forme humaine, te rhabillant au passage. Tu soufflas un coup, enlevas quelques feuilles pris dans tes cheveux, et regardas avec dédain ce même soldat qui t’avait conduit ici. Celui-ci semblait complètement abasourdi. « Quoi ? » Ton air aimable était ta marque de fabrique. « Non, rien … Je n’avais jamais vu de Kitsune auparavant, c’est impressionnant … » Un demi sourire narquois apparut sur ton visage alors que tes yeux se dirigeaient vers le ciel noir, rempli d’étoiles. « Le convoi pour l’étranger est prêt ? » Le jeune soldat acquiesça avec ferveur. Tu demandas simplement si le fameux étranger était réveillé, et le petit homme s’empressa d’aller voir. Tu avais rejoint l’un des feux de camp qui illuminait chaleureusement les tentes militaires et le silence de la nuit. Tu approchas tes mains aux griffes acérées près des flammes dansantes, pour y récupérer de la chaleur, même si tu n’en avais pas besoin. Une petite pensée pour ton abruti de camarade et votre rencontre, avant qu’un petit soufflement mesquin ne caresse la brise. Où pouvait-il être en ce moment ?